
Première partie: fondement, principes et intentions
Le Yoga pour se libérer des fluctuations du mental
Selon Patanjali (Yoga Sutra I.2), le yoga est [la faculté de] diriger les activités du psychisme (B. Bouanchaud). L’essence de toute pratique de yoga est ainsi liée à notre psyché. Des effets thérapeutiques peuvent être observés au niveau du corps physique, mais ce n’est pas la finalité de la pratique du yoga.
Le yoga est une pratique de pleine Présence et d’Attention à ce qui est là, ici et maintenant. Toute expérience que nous vivons est liée à un ensemble de facteurs: nos gènes, notre environnement physique, nos émotions et sentiments, nos croyances, notre mode de vie, voire le hasard et le destin (karma)… Aussi il est vain de pratiquer dans un but préventif ou curatif. Le Yoga permet d’apporter plus de conscience à ce que l’on vit et de réaliser que tout est inter-relié.
Un chemin personnalisé dans l’Unité
Toute pratique de Yoga implique nécessairement le cerveau et le système nerveux, mais il s’agit de porter une attention plus spécifique sur les causes et les effets de la perception que l’on a de ce qu’on est en train de vivre. Tout est dans Tout.
Cette approche est basée sur le Yoga dans toute sa richesse, avec des pratiques adaptées aux besoins des personnes présentant des troubles neurologiques ou mentaux. Elle inclut des postures de Hatha yoga, l’alignement selon l’Aplomb (Noëlle Perez-Christiaens), des adaptations personnalisées de style Iyengar, des pratiques énergétiques (Tantra, Kriya …), des visualisations, méditation…
La motivation pour développer cette approche est venue d’expériences personnelles (dépression, burnout, anxiété, déficit d’attention, hypersensibilité…), familiales (maladie d’Alzheimer, AVC) et professionnelles (sclérose en plaques, fibromyalgie, maladie de Lyme, de Parkinson, commotion cérébrale, bipolarité…), ajoutées à une grande curiosité scientifique (neurosciences, psychologie, Ayurveda).
Science et Yoga
Il est intéressant de noter que la sagesse traditionnelle pointait le mental comme la source de nos souffrances, ce qui est maintenant de plus en plus corroboré par les études scientifiques qui mettent en évidence l’interconnexion corps-esprit. Ainsi non seulement l’environnement (épigénétique), mais aussi les pensées (effets placebo et nocebo), le stress et les émotions (psychoneuroimmunoendocrinologie) peuvent avoir un effet notable sur des pathologies physiques.
De plus en plus d’études scientifiques montrent les effets positifs de la pratique du yoga et de la méditation: des méta-analyses mettent clairement en évidence les bénéfices observés en cas de niveau élevé de dépression, d’anxiété, de fibromyalgie, de PTSD… (références sur demande). En particulier les effets de la méditation sur le cerveau sont maintenant largement étudiés (ainsi la neuroscientifique S. Lazard a montré que 8 semaines de pratique suffisent à changer physiquement des structures du cerveau).
Intentions
Le yoga est un outil inestimable pour se connaitre et se libérer de la souffrance. Pour cela, il faut d’abord prendre conscience et accepter pleinement, sincèrement ce qu’on est en train de vivre: mal de tête, humeur dépressive, frustration de ne pas faire ce que l’on voudrait, peur de souffrir, pensées anxieuses… Puis on peut choisir de prendre les actions qui nous semblent appropriées: pratique de postures de yoga, techniques de purification, pranayama, yoga nidra, visualisation etc tout en lâchant prise sur le résultat. Il faut vivre le présent sans attente, sans attachement, sans refus, sans jugement, comme une expérience unique qui ne dure pas. Le yoga aide à mieux vivre sans nécessairement améliorer la santé: changer ce qui peut être changé et accepter ce qui ne peut l’être.
Principes directeurs
– Stimuler la circulation de l’énergie vitale (Prana) dans tout le corps
– Développer réceptivité, sensorialité (perception), et écoute de soi pour mieux ressentir, avec équanimité, ce qui apparait dans le moment présent.
– Développer Attention et Présence pour observer ce qui est là au niveau physique (ex. tension, douleur), énergétique (ex. fatigue, chaleur), mental (ex. pensées récurrentes, croyances, jugements), émotionnel (ex. dégoût, tristesse, colère, joie, peur).
– Favoriser l’ouverture, l’éveil de la conscience
Comment le yoga agit-il?
Il agit sur tous les systèmes, organes et tissus du corps physique, mais aussi aux niveaux physiologique, énergétique, psychologique et spirituel. Il permet de stimuler, détendre et d’harmoniser le fonctionnement du cerveau qui est capable d’évoluer et de se transformer (neuroplasticité). Le yoga agit aussi par l’intermédiaire du système nerveux autonome sympathique (action) et parasympathique (relaxation), grâce aux nerfs vagues qui relient tous les organes principaux au cerveau. Ainsi les manoeuvres vagales peuvent aider à relaxer le corps (bâillement, stimulation du larynx, poids sur les globes oculaires, sur l’abdomen…) Les nerfs vagues régulent notre attitude de survie: ouverture sociale en état de détente, ou attitude de combat/fuite/figement en cas de danger imminent, d’où l’importance du yoga pour réduire les effets du stress. On a récemment démontré que 90 % des informations remontent vers le cerveau et non en sens inverse.
Autant l’attitude défensive instinctive est indispensable à la survie de notre espèce, autant le stress chronique récurrent est particulièrement néfaste à notre santé. Le yoga joue un rôle essentiel pour détendre le système nerveux et améliorer toutes les fonctions (cardiaques, digestives, hormonales, sexuelles, immunitaires…). Ainsi différentes techniques comme la relaxation musculaire, la méditation, les exercices respiratoires etc peuvent amener le corps en état de repos profond, ce qui change les réponses physiques et émotionnelles au stress, comme cela a été clairement démontré par Dr H. Benson en étudiant des pratiquants de méditation transcendantale (« The relaxation response »).
Observez l’effet de faire simplement trois profonds soupirs. Maintenant!!!
Publié dans la Revue Virtuelle de la Fédération Francophone de Yoga n22
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